2. La respiration abdominale
2. La respiration abdominale

2. La respiration abdominale

Si je vous demande, là, maintenant, de respirer un grand coup, qu’allez-vous faire ? Très probablement, vous allez lever les épaules et effectuer une sorte d’aspiration aiguë, avant d’abaisser les épaules d’un coup et de souffler un peu bruyamment.

On appelle ce type de respiration la « respiration thoracique haute ». On la pratique souvent. Pourtant, figurez-vous que ce n’est pas notre respiration naturelle : on ne la pratique pas en dormant, et les bébés ne la pratiquent pas non plus. Respirez encore une fois de la même façon, mais cette fois, à la place d’expirer, retenez votre respiration en gardant les épaules hautes. Le problème est évident : vous êtes crispé, et n’avez qu’une envie, c’est de lâcher les épaules d’un coup, et tout l’air des poumons avec.

En chant, on va plutôt chercher à être détendu, et à contrôler le flux d’air qu’on lâche. Pour cela, nous utiliserons la respiration abdominale. Globalement, il s’agit de gonfler le ventre à l’inspiration et de le contracter à l’expiration.

La respiration abdominale en pratique

Concentrons-nous d’abord sur l’action de la sangle abdominale, c’est-à-dire le tour de taille. À l’inspiration, il faut ouvrir, élargir, cette sangle abdominale. Imaginez que votre ventre se gonfle d’air, et si possible, vos hanches. À l’expiration, vous devez progressivement contracter le ventre (et un peu les hanches si possible). Cela permettra de contrôler la vitesse de votre respiration, et aussi, avec un peu de pratique, de moduler la puissance de votre son.

Bien évidemment, il n’y aura pas d’air dans votre estomac. À la vérité, en pratiquant la respiration thoracique haute, nous mettons tout l’effort sur nos poumons. Or, nos poumons sont plus un réceptacle pour l’air (ou, plus précisément, l’endroit où se font les échanges entre l’oxygène qu’on inspire et le CO2 produit par l’organisme) qu’un muscle.

Sous les poumons, il y a un muscle qu’on a un peu tendance à oublier : le DIAPHRAGME. Il est extrêmement important pour le chant. La respiration abdominale lui donnera pleinement son rôle. À l’inspiration, l’ouverture de la sangle abdominale va permettre au diaphragme de descendre le plus bas possible ; ainsi, les poumons, libérés de toute pression, se remplissent d’air. À l’expiration, le diaphragme remonte et pousse sur les poumons pour expulser le CO2. Grâce à la respiration abdominale, l’effort du diaphragme va être réparti sur tous les muscles abdominaux.

Si vous êtes intéressé par l’anatomie du chant, je vous conseille le blog de Marie Hutois, spécialiste de la question (et elle-même chanteuse).

Exercices

Voici à présent quatre exercices pour travailler la respiration abdominale. Je vous conseille de les faire devant un miroir, afin de vérifier que vous gardez la bonne posture de chant et que vous ne levez pas les épaules en respirant. Ces quelques exercices sont faciles à faire au quotidien, et ne nécessitent aucune connaissance musicale. Faites-les en étant indulgent avec vous-même : il s’agit surtout, la première fois, de connaître votre niveau actuel. En refaisant régulièrement les exercices, vous vous améliorerez pas à pas.

Exercice 1 : adoptez la bonne posture de chant. Posez une main sur le ventre et une autre sur une hanche. Prenez quelques instants pour vous concentrer : à l’inspiration, laissez le ventre et les hanches se gonfler ; à l’expiration, contractez-les progressivement. Vous verrez qu’il n’y a même pas besoin de faire d’effort ou de bruit avec la bouche ou le nez pour respirer : en gonflant et en contractant le ventre, l’air entre et sort tout seul.

Exercice 2 : toujours avec une main sur le ventre et l’autre sur une hanche, et en respirant comme à l’exercice 1, inspirez en comptant jusqu’à deux, bloquez l’air en comptant jusqu’à deux, puis expirez en comptant jusqu’à deux. Ensuite, inspirez en comptant jusqu’à trois, bloquez l’air en comptant jusqu’à trois, puis expirez en comptant jusqu’à trois. Idem en comptant jusqu’à quatre, et ainsi de suite jusqu’à ce que vous sentiez que ça devient trop difficile à tenir. Le but de cet exercice est d’anticiper : à chaque nouveau tour, vous savez que vous devrez tenir un peu plus longtemps que la fois précédente. Il faut apprendre à bien gérer votre respiration pour que tout se passe bien. Surtout, ne vous forcez pas : arrêtez-vous lorsque l’exercice devient trop difficile. À force d’entraînement, vous pourrez progressivement tenir un peu plus longtemps.

Exercice 3 : en chant, on n’aura pas toujours le loisir d’inspirer aussi longtemps qu’à l’exercice 2. Souvent, l’inspiration devra être brève, mais l’expiration devra tenir plus longtemps. Pour cet exercice, toujours avec une main sur le ventre et l’autre sur une hanche, inspirez en comptant jusqu’à deux, puis expirez en comptant jusqu’à deux. Ensuite, inspirez en comptant de nouveau jusqu’à deux, mais expirez en comptant jusqu’à trois. Puis inspirez jusqu’à deux, et expirez jusqu’à quatre. À chaque tour, l’inspiration aura la même longueur, mais l’expiration durera toujours un peu plus longtemps. De nouveau, apprenez à ANTICIPER. Ici aussi, arrêtez-vous dès que ça devient trop difficile.

Exercice 4 : reproduisez l’exercice 3, mais avec une différence : au lieu de simplement expirer, vous produirez un son « ch ». Cet exercice est un premier exercice d’échauffement vocal. Ne forcez surtout pas : faites un son « ch » tout doux. Si vous sentez que la gorge intervient dans l’exercice, c’est que vous le faites mal. L’air doit simplement passer par la gorge, sans que celle-ci ne fasse rien. Ici encore, arrêtez-vous dès que l’exercice devient trop difficile.

Pourquoi ne pratiquons-nous pas la respiration abdominale au quotidien ?

En effectuant les exercices, vous réaliserez que la respiration abdominale est plus profonde et plus détendue que la respiration thoracique haute qu’on emploie habituellement. Quand nous étions des bébés, nous respirions tous de cette façon. Alors, pourquoi avons-nous la mauvaise habitude de pratiquer la respiration thoracique haute ?

Je pense qu’il y a deux raisons à cela, liées à la société dans laquelle nous vivons. Vous avez remarqué que les bébés ont la faculté de bien se faire entendre. Lorsqu’ils hurlent ou pleurent bruyamment, ils ne forcent pas sur leur gorge, mais portent leur voix. La respiration abdominale donne plus de puissance à la voix. Or, dès l’enfance, on nous encourage à être discrets, à ne pas parler trop fort, sous peine de punition. Mais comment ne pas parler trop fort ? Personne n’est là pour nous l’expliquer. Du coup, nous faisons comme nous pouvons. Nous nous rendons compte qu’en parlant avec la gorge et en respirant avec la poitrine, nous parlons moins fort. Nous nous habituons dès lors à parler et crier de la poitrine et de la gorge.

La seconde raison est due, selon moi, aux canons de beauté. Pour la respiration abdominale, il faut gonfler le ventre. Est-ce que les mannequins, les acteurs et actrices, réputés pour leur beauté ont le ventre rond ? Non : ils ont le ventre bien plat. Pour leur ressembler, nous gardons le ventre rentré. Pourtant, cela n’est qu’un mythe. Il existe bel et bien des chanteurs et chanteuses qui ont le ventre plat auquel nous aspirons, mais qui pratiquent la respiration abdominale. Le ventre plat, pour ceux qui y aspirent (ce qui n’est pas trop mon cas, personnellement), est une question d’hygiène de vie, mais n’a rien à voir avec la respiration abdominale. En l’occurrence, quand vous lisez la biographie des beaux acteurs et belles actrices, vous réalisez qu’ils passent beaucoup de temps à la salle de sport pour entretenir leur corps.

À présent que vous avez commencé la respiration abdominale, vous disposez d’un outil très important pour le chant. Cet outil vous aidera également dans la vie de tous les jours, pour parler plus fort sans forcer, mais surtout pour être plus détendu.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *